Le tombeau est le port où nous arrivons tous après une navigation plus ou moins orageuse.
Proverbe oriental ; Les apologues et contes orientaux (1784)
À propos de Nice (1930) Muet DVDRiP - Jean Vigo
Titre original : À propos de Nice
Réalisateur(s) : Boris Kaufman, Jean Vigo
Année de sortie : 1930
Genre : Documentaire
Pays : France
Sous-Catégorie : Documentaire
Plus d'information sur tmdb : https://www.themoviedb.org
Une promenade dans Nice où l'on voit le décor et son envers.
Nice, en 1929, vit essentiellement de ses casinos, des riches étrangers qui y laissent leur chemise, des grosses femmes folles de leurs bijoux et des dandys aveuglés par leur reflet. L'appétit de la chair et l'obsession de l'argent les distraient un temps de la souveraineté ricanante de la mort. Jean Vigo déclarait de ce document virulent et poétique, son premier film que traversait déjà la fulgurance de son génie : «Se diriger vers le cinéma social, c'est consentir simplement à dire quelque chose. Le but serait atteint si l'on parvient à révéler la raison cachée d'un geste, à révéler l'esprit d'une collectivité, et cela avec une force telle que, désormais, le monde qu'autrefois nous côtoyons avec indifférence s'offre à nous malgré lui, au-delà de ses apparences»...
Critique
Bien qu'À propos de Nice soit un film en forme de procès, il procède d'une esthétique rigoureuse et la composition des plans force l'admiration. À sa manière, et bien que muet, le film s'apparente aux symphonies urbaines. Mais le montage satirique souligne le caractère décadent des privilégiés de la Riviera française : derrière les hôtels écrasants avec leur personnel obséquieux, les casinos, les sports de luxe, les vieilles dames flanquées de leurs gigolos, rôde le spectre de la mort.
Jean Vigo, qui entendait s'inscrire dans le courant du documentaire social et reconnaissait sa dette envers Buñuel, définissait sa démarche comme la recherche d'un "point de vue documenté". Il s'évertuait à révéler la raison cachée d'un geste, à extraire la beauté ou l'image caricaturale d'une personne prise à l'improviste. La méthode de tournage consistait à saisir sur le vif les gestes, les actions, les attitudes, les expressions et de s'arrêter de tourner dès que les gens prenaient conscience qu'ils étaient filmés.
Le montage se charge d'analogies ; certains hommes évoquent les crocodiles, la démarche d'une femme suggère celle de l'autruche. Par la seule construction, par le jeu des contrastes, le cimetière, avec ses sculptures prétentieuses, se juxtapose à la promenade des Anglais, la lancinante répétition des cheminées d'usines rend absurdes les allusions érotiques, par le recours à la distanciation du ralenti, les ébats des jeunes filles qui dansent, apparaissent comme un exercice vain.
Quant il a tourné ce film, Jean Vigo avait vingt-quatre ans, il est mort cinq ans plus tard et sur une aussi courte carrière, il aura réussi, comme il en avait l'ambition, à nous "dessiller les yeux"
Exemples de séquences filmées dans À propos de Nice :
la promenade des Anglais, les palmiers et les chaises louées (disparues)
la Jetée-Promenade (disparue en 1944)
le Palais de la Méditerranée
le Négresco
le cimetière du Château
des cheminées d'usines
Nice vue du ciel
le vieux Nice : les lavandières, les vendeurs de socca
des scènes du carnaval, la « bataille des fleurs »
des visages en gros plans
des filles et des garçons qui dansent
un cireur de chaussures qui tout à coup cire des pieds nus
une jeune femme assise dont les tenues changent jusqu'à apparaître nue
un prêtre et un enterrement (en accéléré) vue des toits
Hébergeur : Uptobox
Type : mp4
Qualité : DVDRiP
Langue : Muet
Taille : 436.62 MB
Tourné dans la ville de Nice au début de l'année 1930, le film, qui est le premier travail cinématographique de Jean Vigo, a été réalisé dans le cadre des Cités symphonies, une série sur les villes dans les années 1920. Cette série veut montrer la modernisation de la ville grâce à un travail formel et mécanique. Le tournage s'effectue sur une journée.
C'est un documentaire d'auteur éminemment personnel qui démontre une démarche réaliste avec un point de vue subjectif déterminé en faisant le portrait critique de la ville et qui, avec virulence, dénonce entre autres les inégalités sociales, sans se départir d'une certaine forme de voyeurisme. Jean Vigo déclarait, après avoir montré un premier montage à Jean Painlevé : « Au travail, j'ai oublié que le film devait être un spectacle, d'où certaines longueurs, insistances, que vous avez remarquées ».
Ce film est ce que Jean Vigo appelle « un point de vue documenté », c'est-à-dire que la caméra doit être considérée comme un document aussi bien à la prise de vue qu'au montage, auquel est attaché un point de vue étayé pour une fin déterminée qui exige qu'on prenne position.
La Cinémathèque royale de Belgique conserve la copie d'un montage préliminaire du film (copie de travail) très probablement unique, envoyée et présentée par Vigo au Deuxième Congrès international du cinéma indépendant qui eut lieu au Palais des beaux-arts de Bruxelles. C'est à cette occasion qu'il rencontra Henri Storck qui devint son assistant et comédien dans Zéro de conduite.
En 1984, le réalisateur portugais Manoel de Oliveira, contemporain de Jean Vigo, réalise Nice - À propos de Jean Vigo dans le cadre de la série télévisuelle « Un regard étranger sur la France ».
En 2001, Marc Perrone compose une musique entièrement à l'accordéon pour accompagner ce film. De même, en 2009, Henri-Claude Fantapié a composé une musique à plusieurs instruments pour ce film.